Sous la forme de sulfate ou d’hydroxyde, le cuivre est la molĂ©cule de base que l’on utilise Ă la vigne pour traiter de manière prĂ©ventive le champignon responsable du mildiou.
Il n’a pas d’effet curatif sur un pied touchĂ© mais il limite la progression de la maladie.
Le cuivre fait partie des mĂ©taux lourds selon la rĂ©glementation europĂ©enne (mais certains industriels demandent Ă ce qu’il soit retirĂ© de la liste car il n’est pas aussi dangereux que l’arsenic ou le plomb par exemple). Cela signifie qu’il ne se dĂ©grade pas, qu’il reste dans les sols et s’en va vers les mers et autres ocĂ©ans tel un marin pĂŞcheur breton partant Ă la pĂŞche Ă la morue… et ça, c’est un problème (le cuivre hein, pas les bretons, enfin si aussi mais c’est une autre histoire).Â
En effet, si les produits à base cuivre sont réellement efficaces contre le mildiou (et quelques autres maladies de la vigne causées par certains champignons) et se dégradent relativement bien, le « cuivre métal » comme on l’appelle dans le jargon, s’incruste dans les sols à chaque nouveau traitement et est porté au fil de l’eau vers les nappes phréatiques et les rivières. Ainsi, tous les ans on accumule des doses de cuivre qui finissent par devenir toxiquse pour l’individu et l’environnement.
Comment s’y prendre pour traiter de manière raisonnée?
Fort heureusement, on ne « peint » plus les vignes en bleu comme naguère (oui, le cuivre c’est bleu. Genre vraiment bleu) et ce pour plusieurs raison :
- on a une meilleure maîtrise aujourd’hui des produits qu’on emploie : parce qu’on a mené des études scientifiques sur l’efficacité des produits, et qu’on a maintenant du recul sur leurs utilisations.
- on traite de manières plus intelligentes : s’il n’y a pas de risque de mildiou, ben on ne met pas de cuivre ….. (c’est pas con hein ?)
- les techniques de pulvérisation ont évolué et sont devenues plus précises et plus localisées.
S’il y a 40 ans les ouvriers rentraient bleu de la vigne, c’est parce qu’il fallait mettre des doses importantes de cuivre pour que cela se voit. Oui : il n’y avait pas d’autres moyens de savoir si on avait traité toute la plante.
Aujourd’hui, on ne voit presque plus le produit sur la plante car on a affiné les techniques de diffusion (à pied ou tracté) et on considère qu’on atteint environ 90% de la surface foliaire en appliquant ces techniques. C’est assez pour protéger le végétal.
On applique en fait un principe bien connu du milieu médical qui est : le rapport bénéfice/risque. On va prendre en compte un ensemble de facteur tel que :
- le taux d’humidité,
- la situation de la maladie chez les voisins et dans la région,
- les prévisions météo à venir,
- la résistance du cépage au mildiou (la syrah par exemple est assez résistante à cette maladie),
- le stade de dĂ©veloppement de la plante etc etc…
C’est Ă partir de ces Ă©lĂ©ments qu’on va dĂ©terminer s’il convient ou non de traiter et Ă quelle dose.Â
Mais attention !
Cette réflexion doit s’inscrire dans la logique du cycle du végétal.
Je m’explique :
Comment s’y prendre pour traiter de manière efficace?
En 2020, nous avons eu un printemps très pluvieux, et donc une forte pression du mildiou. Nous avons traité environ tous les 7 jours en moyenne, pendant toute la saison (c’est beaucoup, normalement c’est plutôt 10 jours). Eh bien si fin mai nous nous étions arrêtés de traiter en nous disant de manière intelligente et vertueuse que nous avions atteint la limite « théorique » à ne pas dépasser (la limite c’est une moyenne sur 7 ans, c’est un peu compliqué à expliquer mais en gros, quand on traite beaucoup une année il faut compenser en traitant moins les années suivantes) nous aurions eu tout faux, nul, zéro.
En effet, le mildiou se serait alors installĂ© tranquillement pendant le mois de juin et tout le cuivre que nous aurions mis avant n’aurait alors servi Ă rien d’autre qu’à polluer les sols.Â
En d’autres termes, si on traite, il faut bien réfléchir en amont pour s’inscrire dans une cohérence globale efficace que l’on mènera jusqu’au bout.
C’est presque le même principe que pour un traitement antibiotique.
Comme le dit maître Yoda : “Fait ou ne fait pas. Il n’y a pas d’essai !”
Les produits à base de cuivre sont les seuls autorisés en Agriculture Biologique pour la lutte contre le mildiou et c’est là que la définition du « métal lourd » est intéressante pour les industriels qui fabriquent ce produit.
En effet, si l’on considère qu’il s’agit d’un métal lourd alors il est toxique et devrait donc être interdit. Mais il est naturel et est le seul traitement d’origine naturelle existant aujourd’hui pour le traitement du mildiou (enfin y a des alternatives, on en parle après).
Si l’on considère qu’il ne s’agit pas d’un métal lourd (du moins pas aussi dangereux que l’arsenic ou le mercure) alors il n’y a pas de raison de ne pas l’utiliser. Mais on sait aujourd’hui que le cuivre à des répercussions sur l’environnement.
Bref la question elle est pas vite répondue comme a presque dit l’autre. Les enjeux sont bien trop importants.
Quid des alternatives ?
Concernant les traitements “alternatifs”, on peut utiliser des purins Ă base de prĂŞle et d’ortie ainsi que des traitements Ă base d’argile blanche. Ces traitements sont Ă©troitement corrĂ©lĂ©s avec les techniques bios dynamiques. Je n’ai personnellement pas de recul sur ces produits mais un confrère viticulteur en a utilisĂ© justement en 2020 et malheureusement, il a perdu une grande partie de sa rĂ©colte. Est-ce dĂ» Ă ses produits ? Ă€ la frĂ©quence d’application ? Ă€ leurs concentrations ? Ou un coup de « pas d’bol » ? Je n’ai pas analysĂ© les donnĂ©es pour essayer de trouver des rĂ©ponses Ă ces questions. Ce que l’on sait en revanche, c’est qu’il y a bon nombre de viticulteurs et de maraĂ®chers qui utilisent ces produits avec succès. Affaires Ă suivre donc …